vendredi 30 juin 2017

Tourmalet

On le nomma Géant tant il faisait souffrir,
Calcinant les égos dans le souffle, et périr
Lentement le vain cours d’une fièvre haletante.
Au fond du corps perdu, l’âme se réenchante.

jeudi 29 juin 2017

Eau et feu

Elle resta longtemps près de la vitre sale
À contempler la mer aux couleurs abyssales
Et le ressac en bas grondait comme un écho
Sans fin de sa fureur au goût de tabasco.

mercredi 28 juin 2017

Sic transit

Les jonques, sur la mer aux teintes violines,
Au plus fort du jusant, glissaient vers les baïnes.
Sur le sable d’un doigt j’ai nos deux noms gravé.
Ne puis-je donc me perdre avant de te trouver ?

mardi 27 juin 2017

Tu

Nous fuyions le destin scellé de l’aube grise,
Au bord des sentiments ténus que l’âme prise,
Et le vent nous soufflait des réponses perdues.
Quand ton sourire vint, le temps fut suspendu.

lundi 26 juin 2017

Tutélaire

Amberle, ton ruisseau jamais ne s’est tari
Qui file au pied des monts, dans les vertes prairies.
Tu es presque aussi vieux que ses galets sans âge
Et les jours t’ont usé autant qu’ils t’ont fait sage.

dimanche 25 juin 2017

Fêlure

Avec sa pointe de diamant, il découpait
Les verres, vitres ou miroirs, fins ou épais.
Son geste était la perfection, jamais de casse.
L’un d’eux se fêla juste avant qu’il ne trépasse.

samedi 24 juin 2017

Inachèvement

Dans le fond de sa veste un jour il les cousit,
Le pion noir, le pion blanc, bizarre fantaisie.
Seule une autre personne en devina la cause,
Ayant les autres pièces, buis et bois de rose.

vendredi 23 juin 2017

L’un et l’autre

Le manuscrit se tait. Ses pages sont scellées.
Quelque part sur la Terre un lecteur a la clé.
Mais il ne le sait pas, rien ne l’y prédestine.
Au hasard l’un et l’autre vont. Le temps s’échine.

jeudi 22 juin 2017

Esprit de l’air

Au sommet geint le vent qui seul n’a pas de maître,
Impénitent voleur. Il claque les fenêtres
Et laisse un tremblement de l’air jusqu’au matin.
Ne lui confiez jamais ni secrets ni potins.

mercredi 21 juin 2017

Ombrée

La roche se délite en chaos minéral,
Entropie sombre et dure où pousse un art floral
Étrange : asphodèles menus, panicauts immobiles,
Un silencieux combat de plantes indociles.

mardi 20 juin 2017

Là où personne

Le havre de nos jours était un pli de l’âme,
Exempt de vents mauvais et de vilaines lames.
Où donc se cache-t-il ? Le cherchons-nous encor
Au point de sublimer le creuset de nos corps ?

lundi 19 juin 2017

Amblyopie

Tes écailles bleu-vert en mourant se ternissent,
On dit même qu’alors s’estompent tes esquisses
Et que l’or de tes yeux dans l’instant s’y fait plomb,
Mais la vue nous trahit, c’est un piètre étalon.

dimanche 18 juin 2017

Caprice

Tant de fils de couleurs dans l’étendue se tordent
En une cordelette étrange, que tu portes,
Autour, innocemment, de ton cou pâle et long.
Concerto pour orchestre et toi, premier violon.

samedi 17 juin 2017

Sans rime

Tu avais cette mine absente des hivers,
Quand les jours de la vie n’inspirent plus de vers
Et ta main dessinait sur le bois de la table
Une esquisse de fleurs… quoi de plus désirable.

vendredi 16 juin 2017

Petite danse

Nous tournions dans le hall de cet ancien hôtel.
Le marbre renvoyait des reflets bleu pastel
Et tu riais de voir les infimes poussières
Étinceler dans l’or de ces rayons solaires.

jeudi 15 juin 2017

Lointains

Tant pis, le siècle brille avec ses jours graisseux.
Tu portes ta mantille et moi, je suis de ceux
Qui tanguent dans l’azur aux pudeurs écarlates,
Au bord de l’horizon… mais d’une terre plate.

mercredi 14 juin 2017

Dans l’instance

Sur la terre peinée chuchotent les esprits,
Les herbes et les fleurs qui pour une ondée prient,
Dans le ciel, le répons des martinets s’élance
Et l’espoir de la pluie donne au tout la cadence.

mardi 13 juin 2017

Centralité

De particules bleues, l’obscurité se teinte
Il se fait tard, je veux éprouver la complainte
Intime de l’envers du décor éternel.
Le temps se fait écho de l’abandon charnel.

lundi 12 juin 2017

D

Les courbes de son corps fascinent le copiste
Et la plume d’airain s’affaire sur la piste,
En donnant du volume à la lettrine d’or.
Le lierre va bientôt s’enrouler sur le bord.

dimanche 11 juin 2017

Patrie

Les jours de belle envie, quand les martinets crient
Dans l’azur au-dessus, je sens que s’apparient
Les couleurs et les chants, le tilleul et la terre,
Aux échelles variées, les corps élémentaires.

samedi 10 juin 2017

Cessation

La grange rousse est close et j’ai barré les portes.
Au fond, le foin s’entasse et les brebis sont mortes
Il y a plus d’un an. Les ronces dans l’enclos
Gagnent jour après jour. Remontent les sanglots.

vendredi 9 juin 2017

Chasseresse

Diane a la peau rebelle et son arc est de bois,
Elle chasse farouche un vieux cerf aux abois,
Puis la brume en silence à ses jambes s’accroche
Et jamais ne dévie la flèche qu’elle décoche.

jeudi 8 juin 2017

Souvenirs

Le coffret de santal est fermé pour toujours.
Au fond sont déposés les plis, sur le velours,
Des amis disparus, quotidiennes missives…
Amis du fleuve, allez, sur l’une ou l’autre rive.

mercredi 7 juin 2017

Couleurs

Cherchant l’azur des yeux, je m’étendis sur l’herbe
Et, las, je m’assoupis, dans un rêve superbe
Où le ciel se fit vert, émeraude pâlie,
Et l’herbe d’un beau bleu de lapis-lazuli.

mardi 6 juin 2017

Sombre passage

Des multiples errances, il n’est que l’irraison
Qui puisse me guider dans la vieille maison.
Qu’une ombre sur le mur me suive ou me précède,
Au bout du couloir tors, rien ne me dépossède.

lundi 5 juin 2017

Coulé

Je jubile et rugis de ma profonde sphère,
Incapable néant que ce soit d’être ou faire,
En cela même, heureux, fond d’un lac assoupi,
Caressé par le froid de l’onde. L’entropie.

dimanche 4 juin 2017

Pénombre

Par le moucharabieh, tu vois les vagues blondes
Assaillir le palais dans la lenteur du monde
Et le soleil se plaît à peindre sur ta peau
Des arabesques d’or au suave tempo.

samedi 3 juin 2017

Oiseau

Je planerai sans peur, dômes et caldeiras
S’étalant au-dessous, autant que durera
Ce rêve entre le ciel et la terre, qui laisse
Une légèreté de l’être enchanteresse.

vendredi 2 juin 2017

Hésitation

Après long temps d’errance, il s’arrêta devant
L’immense porte du sanctuaire des Vents.
Ne pas entrer devint comme une incertitude,
Hésiter fut alors le plus beau des préludes.

jeudi 1 juin 2017

Long cours

Dans l’espace et le temps, intrus, j’ai voyagé,
Vu bien des fois mon ombre vaine s’allonger,
Dormi sur d’improbables quais, pris des navires
Où la cloche tintait dans la brume qui vire.
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