samedi 30 septembre 2017

Sous la peau

Les encres en flacon, la chair qui se fait rare
Ont pris un rendez-vous sous la plume bizarre
Et se sont mariées dans un secret dessin
D’entrelacs et de mots sous l’orbe de tes seins.

vendredi 29 septembre 2017

Longue pause

On a tout notre temps. L’eau s’écoule avec grâce
Autour de tes pieds nus, quand vient la marée basse.
Il suffit d’un soleil qui traîne à l’horizon.
J’aime ses reflets rouge sang, sa déraison.

jeudi 28 septembre 2017

Guitare

Sans même la jouer, les harmoniques sonnent
En caressant cette guitare et je frissonne
Au doux chuintement d’un glissando passé
Que ma mémoire à l’instant t’a dédicacé.

mercredi 27 septembre 2017

Mes mots

En marchant, j’ai glané sur la terre des mots
Tout aussi beaux que ces galets, près du hameau,
Qu’enfant je déposais sur la grande étagère,
Au grand dam de Maman, disant : « Tu exagères ! »

mardi 26 septembre 2017

Tir

La flèche traversa des couches d’air profondes.
Elle suivit son cours et sa cible en ce monde
Et nul ne sut quel arc ainsi l’avait lancé,
Ni quel archer tirait : cible ou flèche pressée ?

lundi 25 septembre 2017

Germe

La texture du temps rapide enfin s’émousse.
Où je t’ai retrouvée, nous partageons en douce
Une palpitation légère mais sereine,
Un peu comme l’union d’un sol et d’une graine.

dimanche 24 septembre 2017

Qui de nous

Quand tu me souriais, penchant ta jolie tête,
Il me semblait que l’air autour était en fête,
Alors nous nous prenions les mains que nos émois
Soudaient pour n’être plus vraiment ni toi ni moi.

samedi 23 septembre 2017

Vol libre

Je plane longuement sur l’invisible flot,
Glissant dessus la plaine en fantôme falot,
Conscient que l’air me porte autant que vit ma chute,
Ailes épanouies. Je suis une volute.

vendredi 22 septembre 2017

Point de mire

C’était hier peut-être, à moins que ce ne fut
Demain. Le temps me lâche et fait trop de raffut.
Les guêpes font leur nid, les feuilles mortes tombent.
Au-dessus de la pierre oscille une palombe.

jeudi 21 septembre 2017

Dimensions

La neige sur l’écran palpite à sa manière,
Or je suis près devant ; je suis aussi derrière
Où l’eau se fait étale, exilé dans l’azur.
La douceur océane est à ma démesure.

Bel ouvrage

Le livre se referme à la dernière page.
Un signet de soie rouge étonnamment dégage
Un parfum de violette et de musc au milieu.
Une ombre bleue s’évade. Un livre merveilleux.

mardi 19 septembre 2017

Vertes ombres

Je glisse mon épaule au-dessous de ses branches
Et l’arbre, tendre bois, vers mon désert se penche.
À mes pieds, dans le sol, ses racines vont loin,
Puisant l’eau sans un bruit. Je desserre les poings.

lundi 18 septembre 2017

Bataille

De ces îles flottant au-dessus de l’automne,
Il ne reste que l’ombre à peine qui frissonne…
Au plus noir des combats, les éclairs sont venus
Montrer aux forcenés combien l’homme était nu.

dimanche 17 septembre 2017

Baïse

Pourquoi bat-il des mains sur cet air de guitare,
Assis sur le plat-bord d’une vieille gabare ?
Un guitariste soûl, le tempo de travers,
Qu’un marinier pourtant plie à son univers…

samedi 16 septembre 2017

Passager

J’ai passé, repassé sur les fils noirs d’hiver,
Agacé, puis glacé, quand, le cœur à l’envers
Est à bout, mais debout, je continue ma route
Où la boue, sans tabou, me laisse dans le doute.

vendredi 15 septembre 2017

Avarie

Le long du vieux ferry, bardé de tôles grises,
Une eau glauque s’écoule, aux huiles imprécises.
Étrange irisation. J’entends les grincements
Du métal qui se rouille, irrémédiablement.

jeudi 14 septembre 2017

Cuisine

J’eus l’impression d’avoir ôté toutes les traces
En remettant la table et la chaise à sa place.
Au-dessus, la lumière oscillait sans un bruit,
Colorant d’une aura la corbeille de fruits.

mercredi 13 septembre 2017

À la source

Au milieu de la mousse une source jaillit
Près du jardin d’hiver, aux heures de la nuit.
Recueille dans tes mains, mon amie, cette eau claire.
À peine bue, sens-tu le chœur des voix stellaires ?

mardi 12 septembre 2017

Déferlantes

Dans le chaos des vagues, il s’est désamarré,
L’esquif au bois de rose où tu tiens, effarée,
La barre sans effet. Seule ta chevelure
Aux mèches de mousson rehausse la voilure.

lundi 11 septembre 2017

Margelle

L’eau verte bouillonnait dans le cercle de pierres.
Au-delà, les lueurs de la ville minière
Éclaboussaient la nuit. Fut-ce pour cet instant
Qu’enlacés, nous changeâmes l’hiver en printemps ?

dimanche 10 septembre 2017

Ne pas cueillir

Cette fleur est étrange, à l’arbre de la nuit
Pendue de désespoir, aux fragrances de fruit.
Je ne l’ai pas cueillie. Qu’elle oscille sans cesse !
Il y a des pensées dans ses vaines caresses.

samedi 9 septembre 2017

Annonce

Les cheminées de fée se sont assemblées toutes
Au milieu du désert, pour envoyer sans doute
Aux étoiles des voix minérales peinées.
La folie sur la Terre va se déchaîner.

vendredi 8 septembre 2017

Durée

Le crépuscule roux lentement se consume.
À l’horizon se perd une scorie de brume.
Il fait doux. Tu te tiens, farouchement sereine,
En attendant déjà que l’aurore revienne.

jeudi 7 septembre 2017

Répit

Il dort sur la banquette arrière du taxi ;
Dehors les gens sont las, au bord de l’asphyxie.
Les nuées déchirées dans le ciel gris se traînent.
En son rêve s’envole une feuille de frêne.

mercredi 6 septembre 2017

Disjonction

L’espace a des penchants pour les courbes contraires
Ici quelques galets s’entassent, funéraires,
Ailleurs, le feu dévore en flammèches aiguës,
Partout se love l’être aux formes contiguës.

mardi 5 septembre 2017

Reprise

Le fil monte et descend sur le chas de l’aiguille
Et l’étoffe élimée serpente puis vacille.
Ainsi le temps passé ravaude le tissu,
Même enchevêtrement, même fatale issue.

lundi 4 septembre 2017

Dépossession

Je l’ai suivi à petits pas, ce chemin qui
Menait aux terres désolées des biens acquis.
Raide route fut le retour, à désapprendre
Et laisser le vent s’emparer des tas de cendre.

dimanche 3 septembre 2017

Aubaine

Je mis de la lenteur à oublier le temps,
Au rythme des guitares rudes des gitans
Qui croisèrent alors ma route clandestine,
Et toi qui gambadais, toute fraîche et mutine...

samedi 2 septembre 2017

Argile

L’argile connaît tout du feu, de l’eau, de l’air,
Mais elle n’a rien dit. Les hommes sont trop fiers.
Son temps n’est pas leur temps. Dans le creux de ses mailles,
Elle a bien d’autres grains que les grains des semailles.

vendredi 1 septembre 2017

Devenir

Était-ce insignifiant, glissé dans cette lettre,
Un peu de ce tissu dont, naguère, peut-être,
Émue, vous auriez fait, pour me plaire, un mouchoir
Que vous auriez laissé si coquettement choir ?
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