Il avait traversé l’océan des pétrels,
Entendu la sirène entre les archipels
Et revenait au port les yeux lavés de bleu,
Toujours tenant la barre avec ses doigts calleux.
lundi 30 novembre 2020
À bon port
dimanche 29 novembre 2020
Violoncelle
L’étrange chemin lent, dans le secret des ombres,
Entre tant de colonnes, autour, me désencombre.
Une cantate au loin, d’un violoncelle, court
Je reste infiniment dans l’aube du parcours.
samedi 28 novembre 2020
Camp
Les lampes de métal occultent les étoiles.
En rage, il déambule entre les murs de toile.
Autour montent les cris, les pleurs, les agonies.
Las-bas flotte un drapeau. La vie, quelle ironie.
vendredi 27 novembre 2020
Rouille
Le métal a rouillé le long des vitres sales.
On y devine encor la mention « succursale ».
Ici rien ne subsiste de la rue d’antan.
Les années ont passé. Ce n’est pas important.
jeudi 26 novembre 2020
Vol en dessous
C’est un aller-retour par une porte étrange
Entre deux mondes gris que je fis tel un ange
Oublieux du céleste espace. Je ne sus
Plus les étoiles qui scintillaient au-dessus.
mercredi 25 novembre 2020
Lignes de fuite
Les lignes sur l’écran du moniteur racontent
Une vie qui s’écoule, un cœur rouge qui compte
Avec parcimonie les secondes tenues.
La nuit est à la peine et tu n’es pas venu.
mardi 24 novembre 2020
Vagabondage
Autre nuit dans le clair effroi qui longe la
Tour immense en béton d’où passent les éclats
Vacillants des foyers par autant de fenêtres…
Et mon âme voyeuse a du mal à renaître.
lundi 23 novembre 2020
Latérite
La poussière courrait le long des routes sèches
Et les enfants pieds nus filaient comme des flèches
En criant sous le plomb du soleil de midi.
La vie battait son plein. C’était un mercredi.
dimanche 22 novembre 2020
Amour
Qui montent de l’absence et s’élancent, rameaux
Dans l’air froid d’un matin de novembre. Je t’aime.
Et les jours et l’absence et les mots se ressèment.
samedi 21 novembre 2020
Accompagnement
Le battement de la musique a sur mon cœur
Un effet double, un peu cordial, un peu moqueur.
Qu’importe alors si je me laisse en vain glisser
Dans les bas-fonds d’où je m’étais pourtant hissé.
vendredi 20 novembre 2020
Affaissement
Mes revues ordonnées sur l’étagère tentent
En vain de se tenir droites, mais, impotentes
Envahissent l’espace, à droite, disposé.
La connaissance bouge ainsi. J’ai la nausée.
jeudi 19 novembre 2020
Sentiments
Mon cœur a débordé ce soir de sentiments
Comme une inondation lente, indéfiniment
Joie, peine, amour auprès de personnes fugaces.
Assis, je suis glacé, le cœur inefficace.
mercredi 18 novembre 2020
L'écureuil
Le noyer jette un froid dans le fond du jardin.
J'y vais chercher les noix dans leur brou, quand soudain
Détale un écureuil sur les feuilles qui bruissent.
Un long moment s'étire avant qu'il s'enhardisse...
mardi 17 novembre 2020
Mon chat
Mon chat reste indulgent lorsque je me prélasse.
Il le fait avec infiniment plus de grâce.
Il a trouvé le mouvement perpétuel
Quand il s'étire ainsi. Mon chat est immortel.
lundi 16 novembre 2020
L'ombre
La verdâtre lueur de la galerie danse
Au milieu des tuyaux de fonte. Avec prudence,
Il progresse, espérant découvrir une issue,
Mais une ombre le piste et chasse à son insu.
dimanche 15 novembre 2020
La vie
Le mouvement me presse et me sauve et me tue
Quand l'infime trajet de l'instant perpétue
La faim de n'être pas. Je pars à la dérive
Emporté par une onde et glaciale et trop vive.
samedi 14 novembre 2020
Sous la lune
La pâleur argentée de la lune m’entraîne
En des lieux interdits, de curieuses garennes
Où l’herbe reste douce au pied qui la parcourt.
La conscience d’ici ne m’est d’aucun secours.
vendredi 13 novembre 2020
La tournée
Aux poches du caban, sur la voie de l’hiver,
J’ai toujours quelques noix, jamais de revolver.
Le renard le sait bien, qui ne craint pas ma route.
Et la vie continue, la pluie toujours s’égoutte.
jeudi 12 novembre 2020
À la fenêtre
Un rouge-queue sur le rebord de la fenêtre
Est décidé, sans hésiter, de tout son être,
À chanter la beauté du jour qui se déploie.
Suis-je l’oiseau ? Suis-je le ciel ? Je m’y emploie…
mercredi 11 novembre 2020
Unité
Je n’ai pas vu le film (existe-t-il encor ?).
Je crois être en retard. La nuit me fait du tort.
Je rêve. Un corps se meut sur de curieuses routes.
Un corps qui est le mien, peut-être, mais j’en doute.
mardi 10 novembre 2020
Narcisse
Tu vois dans le miroir la scissiparité,
Tu n’envisages pas la moindre altérité,
Ta beauté se complaît lors d’œillades obscènes.
Il redescend déjà, le rideau sur la scène.
lundi 9 novembre 2020
Glas
La camarde est osseuse, arpentant le trottoir.
La rue étant déserte, elle bat les heurtoirs
Des portes désignées sur sa liste macabre.
Elle aimerait changer sa faux contre un beau sabre.
dimanche 8 novembre 2020
De la terrasse
Jamais nul ne marcha de pareille manière,
Une danse de chat, d’amazone guerrière.
Un instant, j’en fus coi, la tasse suspendue,
Puis elle s’envola, dans sa jupe fendue.
samedi 7 novembre 2020
Nostalgie
Madame a le teint blême de s’apitoyer
Sur sa vie, son destin, ses moments dévoyés.
Le temps s’écoule ainsi dans le regret des heures.
Elle oublie le présent, la musique majeure.
vendredi 6 novembre 2020
Le Roi Fennec
Sous les dunes de sable, à l’orée du désert,
Vit le vieux Roi Fennec, le gardien des enfers
Aux oreilles de pierre immenses et profondes,
Écoutant les échos des soubresauts du monde.
jeudi 5 novembre 2020
À bout de souffle
Je courus, essoufflé vers le trottoir d’en face
Et tout autour de moi, des images fugaces
Agrandies plus ou moins, photos instantanées,
De ma vie s’affichaient, vitrines retournées.
mercredi 4 novembre 2020
Ô voyage
Tant de livres ouverts sur le bureau s’entassent !
Catherine en souffrance éteint, de guerre lasse,
Un lumignon. Le soir, précieux vade-mecum,
La fait plus poétesse, avant le laudanum.
mardi 3 novembre 2020
Brindilles
La poussière du jour dans la cellule brille
Et la femme voilée pousse quelques brindilles
Au sol, en murmurant des prières lassées.
Bientôt viendra la nuit, solitude glacée.
lundi 2 novembre 2020
Lambrusque
Le mur est recouvert d’une vigne sauvage
Et sous les coups du vent, quelques feuilles sans âge
Entament de concert leur vol vers le gazon.
L’automne est en émoi. J’aime cette saison.
dimanche 1 novembre 2020
Très thé
La bouilloire chuchote sur la cuisinière,
Et puis elle chuinte, à point pour la théière.
Encore un peu de temps, l’infusion bat son plein.
Fin du jour. Nous goûtons l’ambre sur le déclin.